On a appris à vivre avec
On a appris à mettre un masque
À garder ses distances
À s’éloigner encore plus
Hérissons ou cactus
À rêver de danse et d’étreintes comme si c’était irréalisable
À rêver de salles obscures comme si c’était inconcevable
À imaginer la vie la nuit comme si c’était invraisemblable
À regretter une rencontre comme si on était coupable
À culpabiliser pour rien
À culpabiliser pour tout
À s’empêcher
À se contrôler
À se surveiller
À vérifier qu’on ne rêve pas
À cauchemarder d’horaires qu’on ne tiendra pas
Vite vite le couvre-feu boiteux
On a appris cette vie en pointillés
Cette vie au ralenti
Cette vie à la sauvette
Comme si elle était banale, presque normale,
Comme si elle ne faisait pas si mal
Le temps bégaie et nous assomme
Routine triste et monotone
Hier est la répétition de demain
Demain radote hier
hhhhh
Ce n’est pas si grave
On s’habitue à tout
Qu’ils disent
Pas à tout. Non.
On ne s’habitue pas aux injonctions, aux contradictions, aux aberrations
À ces absurdités qui se déversent
Aux atermoiements, aux revirements
Aux complications, aux falsifications
À l’autosatisfaction
Aux nouvelles qui dégringolent
Aux chiffres qui décollent, morbide farandole
Au mélodrame qui s’emballe
Au mauvais théâtre des mots flous, des mots vides
Aux tristes coulisses de la crise
Aux pathétiques dialogues de sourds
Au tragique tout court
kkkkkkkkkk
Heureusement, la jolie saison entre en scène.
L’intrigue est connue mais quel ravissement
Spectacle incandescent, revigorant
Qu’on redécouvre éperdument
La dramaturge nous fait de l’œil, pas bégueule
Unité d’espace, de lieu, de temps
Ici maintenant
On ne s’habitue pas à l’émerveillement du printemps
Les fleurs délicates qui secouent la léthargie
Le soleil qui nous éblouit, nous étourdit
La chaleur qui nous envahit
La nature, fragile et infinie
On ne s’habitue pas au frémissement du printemps
Aux taches roses et blanches par-delà les murs
Aux bouquets d’arbres à l’assaut du ciel
Au badinage des violettes
Aux confidences des primevères
Aux oiseaux qui reviennent
À leur pépiement infini, têtu, entêtant
On ne s’habitue pas au bourdonnement du printemps
À ses dialogues charmants
À la terre qui s’assouplit
Aux giboulées de couleurs
On s’émerveille d’une ardeur, d’une senteur
On se rêve botaniste, aquarelliste
Les mots montent comme une sève dans nos jardins secrets
Les printemps d’antan fleurissent, en grappes de souvenirs
Les bosquets où l’on pourra se cacher
Les buissons où l’on pourra s’inventer
Les promesses d’herbes folles
La lumière des forsythias
La délicatesse des jonquilles
Le vert qui s’attendrit en bourgeons.
La finesse des pervenches
La légèreté
La beauté parfaite
La beauté inquiète
De ne pas durer, d’être si vite emportée
Cette soif d’en profiter
Cet élan qui nous convoque, qui nous emporte
Qui nous oblige aussi
Qui nous oblige à nous sentir vivants
Ne nous habituons pas au printemps
Magnifique Poème ! Décidément, je suis fan !
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Merciiiiiiii !
Bises fleuries
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J’ai adoré Caro! Ça m’a un peu rappelé ce bon vieux Charles d’Orléans 🙂
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Merciiii pour ta lecture et les références poétiques ! Cela m’a donné l’occasion de relire un classique 🙂
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Heureusement il est inexorable, et pourtant ne nous y habituons pas ! Joli rappel ! Merci Caro, poème qui m’a beaucoup touchée
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Merci à toi ! Eh oui, le printemps est fidèle au RV, lui, au moins… Pas de parole en l’air, juste de l’énergie vitale !
Bises
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Ah ! le printemps ! Il nous met à chaque fois du baume au coeur, tout comme tes textes… Bravo Caro !
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Merci pour ton commentaire ! Oui, heureusement que le printemps est là ! On en a encore plus besoin cette année… 😉
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Rappel des balades de ces derniers jours dans la campagne aux jaune et vert vifs, aux nuances de bruns, aux touches blanches.
Oui, tu as tellement raison : de si belles choses autour de nous qui nous émerveillent chaque année!
Merci pour ce magnifique poème!
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Merci pour ta lecture et pour ta belle évocation… On s’y croirait ! 🙂
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